Le moineau et la jument

Ce récit est ouvertement sexiste. Je vous recommande de le lire avec une distance critique et d’interroger les imaginaires qu’il convoque.

⚠️ Ce conte s’adresse à un public averti.

Dans la cour d’un paysan se trouvait toute une bande de moineaux ; l’un d’eux commença à se vanter devant ses camarades :

« La jument grise, » dit-il, « est amoureuse de moi ; elle m’adresse de fréquentes œillades ; voulez-vous que je la βαισε devant toute notre honorable réunion ?

— Voyons un peu ! » répondirent ses camarades.

Le moineau vole vers la jument et lui dit :

« Bonjour, chère petite jument !

— Bonjour, chanteur ! qu’est-ce que tu me veux ?

— Voici : je voudrais te demander…

— C’est très bien, » reprit la jument ; « chez nous, à la campagne, quand un garçon commence à en tenir pour une jeune fille, c’est l’usage qu’il lui fasse des cadeaux, qu’il lui achète des noix et du pain d’épices. Mais toi, qu’est-ce que tu me donneras ?

— Dis seulement ce que tu veux.

— Eh bien ! va me chercher, grain par grain, un tchetvérik (1) d’avoine ; et alors nous ferons l’amour. »

Le moineau se mit à l’œuvre ; après de longs efforts il réussit enfin à charrier tout un tchetvérik d’avoine. Ensuite il accourut à tire d’aile auprès de la jument :

« Allons, ma chère, l’avoine est prête ! »

En prononçant ces mots, le moineau ne se sentait pas d’impatience.

— « Bien, » répondit la jument ; « il est inutile de remettre l’affaire ; je ne puis pas rester honnête toute ma vie et l’amour d’un gaillard comme toi n’a rien de déshonorant ! Apporte l’avoine et appelle tes camarades : je ne rougirai pas de t’appartenir ! Pose-toi sur ma queue, tout près de mon κυλ (cul), et attends que je lève la queue. »

La jument se mit à manger l’avoine, le moineau se plaça sur sa queue ; les camarades regardant ce qui va se passer, la jument dévora, dévora, puis leva la queue et le moineau s’introduisit brusquement dans son derrière. La jument le serra avec sa queue et il se trouva horriblement mal. Cependant, après avoir mangé, elle se mit à péter ; le moineau sortit précipitamment du lieu où il était et se mit à dire avec jactance à ses compagnons :

« Voilà comme nous sommes, nous autres ! la jument n’a pas pu y tenir : vous avez entendu comme elle a pété. »

1) Le tchetvérik = 2,621 décalitres.


Le moineau et la jument (II) dans Contes secrets Russes (Rousskiia Zavetnia Skazki) traduits par Isidore Liseux, Paris, Ed. originale française, 1891, p. 3-5.

Isidore Liseux, né en 1835 et mort en 1894, est un auteur, traducteur et éditeur français. Il publie des textes rares, à caractère érotique ou anticlérical, comme De la démonialité et des animaux incubes et succubes, De la Sodomie ou encore les Contes secrets russes.

Paule Adamy. Isidore Liseux 1835-1894: Un grand "petit éditeur", Plein Chant (Bassac) 2009.

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Site livresraresetanciens.com, consulté le 30 octobre 2025 : https://livresraresetanciens.com/index.php?title=Isidore_Liseux

Site www.textesrares.com, consulté le 30 octobre 2025 : https://www.textesrares.com/liseux/liseu.htm

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